Année : <span>2017</span>

Pramoedya Ananta Toer : La fille du rivage

La fille du rivage
La fille du rivage

Résumé :

La jeune fille d’un pêcheur de la côte nord-est de Java a été demandée en mariage par un aristocrate local, fasciné par sa grande beauté. Elle a quatorze ans, et dans cette Java féodale du début du vingtième siècle, elle n’a guère le choix. Ce mariage arrangé la fait passer sans transition d’une vie certes pauvre et rude, mais libre et naturelle, à une existence cloîtrée, dans la vaste demeure ceinte de murs de son époux, le Bendoro. La jeune fille est intimidée et malheureuse, mais doit très vite s’adapter au langage et aux usages de sa nouvelle vie.

L’auteur :

Considéré comme le plus grand écrivain indonésien, il est notamment connu pour son combat politique contre la puissance coloniale hollandaise puis contre le régime de Suharto, ce qui lui a valu d’être incarcéré pendant de longues années avant d’être assigné à résidence pendant encore près de vingt ans.

Mon avis :

Un roman touchant qui nous emporte dans une Indonésie du début du vingtième siècle aux côtés d’une toute jeune fille vendue à un homme riche.

L’auteur précise dans la préface qu’il s’est inspiré de la vie de sa grand-mère « une personnalité, un caractère ».

À quatorze ans, fille de pêcheurs, elle mène une vie simple et libre. Puis un messager vient la chercher un jour et l’emmener en ville : elle a été mariée à un noble qu’elle n’a jamais vu. Ses parents l’accompagnent et la rassurent : tu vas vivre dans une belle maison, tu ne seras plus obligée de travailler. La petite a peur et pleure. C’est un homme pieux et un chef puissant lui dit son père.

La jeune fille sera obligée de s’habituer à sa nouvelle vie et de tout faire pour que son époux soit satisfait de ce mariage. Sa servante va l’aider en lui donnant des indications sur le comportement qu’elle doit avoir. Se souvenir qu’elle n’est plus une fille pauvre mais la maîtresse de maison dorénavant.

Une nouvelle vie comme une prison dorée, avec ces peines et des joies aussi.

Un livre dépaysant, émouvant qui se lit avec plaisir.

Une écriture fluide, beaucoup de dialogues et une ambiance parfaitement restituée : je suis partie en Indonésie avec tous ces personnages. Un lexique à la fin de l’ouvrage complète le récit.

Une lecture que je vous recommande pour partir à la découverte de l’Indonésie.

 

Notation :

Paul Gauguin : Avant et après et Je, Gauguin de Jean-Marie Dallet

Avant et après
Avant et après

Présentation de « Avant et après »:

Août 1901, Paul Gauguin quitte Tahiti à bord d’une goélette pour les îles Marquises. Il débarque dans l’île d’Hivaoa, construit son propre faré qu’il nomme Maison-du-Jouir, peint et écrit. Avant et après est le récit de tous ses exils et de ses combats : Arles, la Bretagne, Panama, Papeete. Gauguin passe également en revue toutes les morales qui l’ont poussé à fuir l’Europe et à se tourner vers un monde primitif : «Morale du cul, morale religieuse, morale patriotique, morale du soldat, du gendarme.»

Je, Gauguin
Je, Gauguin

Présentation de « Je, Gauguin »

Autobiographie imaginaire, certes, mais non fantaisiste, à laquelle Dallet ajoute le contexte social tel qu’il apparaît aujourd’hui dans les perspectives de l’Histoire, et où chaque fait, chaque revirement de situation, chaque malheur prend la couleur du destin. Sans compter que la part d’ombre, la face cachée de toute existence, est comme devinée à travers les tableaux du peintre chronologiquement revus.

Mon avis :

Deux livres pour découvrir ce grand peintre Gauguin : l’un qualifié comme étant son meilleur livre et l’autre, une biographie écrite par un écrivain passionné par ce personnage et connaissant bien la Polynésie.

Je vais donc vous livrer mes impressions croisées sur ces deux ouvrages, j’ai lu les deux livres en parallèle.

Gauguin se raconte tel qu’il est : entier, bourru et se dévoile sans retenue. Sa colère et ses revendications enflamment le récit. Quand on est artiste et que l’on crève de faim, la vie est bien difficile.

Il passe en revue son enfance, ses choix, ses amis les peintres. Il dit qu’il n’a pas écrit un livre, ni des mémoires.

C’est parfois décousu mais toujours vivant et intéressant.

La biographie, plus littéraire, peut se lire en écho au texte du peintre.

Écrite à la première personne et chronologiquement, elle se lit vite car l’auteur parvient à nous accrocher dès le début. La vie de Gauguin est jalonnée d’aventures, de découvertes et de grands espaces. Il a parcouru le monde et exercé de nombreux métiers ne parvenant pas à vivre de sa peinture.

J’ai été bien sûr très sensible aux descriptions de la Polynésie : Tahiti, Moorea et Les Marquises. Les polynésiens l’ont adopté même si la vie était difficile aussi là-bas pour le peintre : il avait faim aussi sous les Tropiques.

Le style est vivant et imagé.

En synthèse : une lecture fluide et passionnante.

Deux récits à découvrir aux Éditions de La Table Ronde collection La Petite Vermillon.

 

Notation :

Joyce Carol Oates : Paysage perdu

Paysage perdu
Paysage perdu

Présentation :

C’est avec un mélange d’honnêteté brute et d’intuition acérée que Joyce Carol Oates revient sur ses jeunes années. Son enfance pauvre dans une ferme de l’État de New York fourmille de souvenirs : ses parents aimants, ses grands-parents hongrois, les animaux, la végétation, le monde ouvrier, l’école.

Ces années lui offrent à la fois un univers intime rassurant, mais un univers limité, cerné par des territoires inaccessibles, propices à enflammer l’imagination de la jeune fille qui trouve là ses premières occasions de fiction.

L’auteur :

Membre de l’Académie américaine des arts et des lettres, titulaire de multiples et prestigieuses récompenses littéraires, parmi lesquelles le National Book Award, Joyce Carol Oates occupe depuis longtemps une place au tout premier rang des écrivains contemporains. Elle est l’auteure de recueils de nouvelles et de nombreux romans dont Les Chutes (prix Femina étranger en 2005), Mudwoman (meilleur livre étranger en 2013 pour le magazine Lire) et Sacrifice.

Mon avis :

La grande Joyce Carol Oates nous livre ses souvenirs et cela se lit comme un roman.

Captivant, vous comprendrez d’où lui vient sa passion de l’écriture et découvrirez une vie bien remplie sous le signe de la littérature.

Joyce nous raconte son enfance, sa sœur handicapée, ses parents aimants qui l’ont aidée et encouragé à faire des études malgré leur condition modeste.

Sa grand-mère passionnée par la littérature, lui offrira le livre « Alice aux pays des merveilles » et une machine à écrire. Ce livre extraordinaire, dit-elle, a changé sa vie alors qu’elle n’avait que neuf ans. Alice devient un modèle, lui donne envie de devenir écrivain et lui montre le caractère parfois absurde et fascinant de notre monde.

Cette petite fille dotée d’une grande imagination souffre aussi d’insomnies à l’adolescence et sort la nuit se promener le long de la route proche. Elle est fascinée par la lumière des phares des voitures et nous raconte la mort de son grand-père.

Les paysages perdus sont ceux de notre enfance qui nous hantent toute notre vie.

La plume acérée de Joyce Carol Oates nous emporte dans ce voyage au cœur de ces souvenirs.

Un livre indispensable pour comprendre l’émergence d’un grand écrivain. Si vous aimez cette auteure vous ne serez pas déçu.

Précipitez-vous sur ce récit publié aux Éditions Philippe Rey et en librairie depuis le 5 octobre.

 

Notation :

Laurence Baranski : Le coming out spirituel

Le coming out spirituel
Le coming out spirituel

Présentation :

Dans ce livre, Laurence Baranski applique le coming out aux domaines spirituel, ésotérique et mystique. Sans tabou, elle dévoile ce que nous sommes nombreux à penser, ressentir, et expérimenter, sans oser l’exprimer publiquement. En effet, nous sommes nombreux à nous questionner sur le sens, la conscience, la vie et l’esprit. Nous sommes nombreux à penser et ressentir que la vérité est ailleurs, au-delà du voile de matérialité qui obscurcit l’horizon.

L’auteur :

Laurence Baranski évolue à la croisée des univers de l’entreprise, des mouvements citoyens, et de la spiritualité. Elle est coach et conseil, spécialiste des processus de changement et de transformation individuels et collectifs. Auteure de plusieurs ouvrages sur ce thème, dans le champ de l’éducation, l’entreprise, et la société, elle a notamment publié en 2007, avec Jacques Robin, L’Urgence de la métamorphose, et plus récemment, en 2016, J’ai fait trois fois le tour de la Terre.

Mon avis :

Un essai pour réfléchir et s’interroger sur l’ontologie, la place de chacun et le sens de la vie.

Ce qui m’a intéressée c’est la variété des thèmes abordés et la manière de les présenter : des faits, des sources et des expériences. Pour le lecteur, cela suscite de l’intérêt puis une réflexion sur les possibilités évoquées.

J’ai été sensible au chapitre sur la place du ressenti dans la connaissance scientifique, dans la vie tout est relié précise l’auteur. Abraham Maslow, psychologue américain, proposait que la science intègre dans son domaine les faits de la psychologie personnelle et existentielle.

J’ai aussi apprécié les chapitres sur :

– les passerelles possibles entre science et spiritualité (nos émotions et intentions influencent le réel )

– la partie sur « la reliance » : à soi-même et aux autres pour s’ouvrir et s’enrichir et avancer tous ensemble.

L’auteure rappelle l’importance de la connaissance de soi, de retrouver la spontanéité et la curiosité de l’enfance pour savoir s’émerveiller et réinventer notre quotidien.

Nos rêves peuvent transformer la réalité.

Pour en savoir plus : le site de l’auteur

Un livre à découvrir aux Éditions Exergue chez Tredaniel.

 

Notation :

Hwang Sok-yong : Au soleil couchant

Au soleil couchant
Au soleil couchant

Résumé :

Au soir de sa vie, un homme riche et comblé se demande s’il n’est pas passé à côté de l’essentiel. Park Minwoo, directeur d’une grande agence d’architecture, a la satisfaction d’avoir réussi sa vie et contribué efficacement à la modernisation et à l’urbanisation de son pays. Né dans une famille pauvre vivant dans un quartier misérable de Séoul, il s’est, grâce à ses talents, arraché à son milieu. L’homme célèbre et sûr de lui qu’il est devenu reçoit un jour un message d’une amie d’enfance qui l’a aimé. Les souvenirs du passé ressurgissent, l’invitant à replonger dans un monde qu’il avait oublié, peut-être renié, et à redécouvrir ce que la vie des gens dont il s’était détourné avait de dur mais aussi de chaleureux.

L’auteur :

Né en 1943 en Mandchourie, où sa famille avait fui l’occupation japonaise, Hwang Sok-yong arrive en Corée en 1945, d’abord au Nord, puis au Sud. Il combat les régimes autoritaires qui se succèdent jusqu’à la fin des années 1990, est emprisonné pour ses idées et milite pour la réconciliation des deux Corées. Son œuvre, traduite dans le monde entier, témoigne de ses combats pour la liberté. « Hwang Sok-yong est aujourd’hui, sans conteste, le meilleur ambassadeur de la littérature asiatique », a écrit le prix Nobel de littérature Kenzaburô Oe.

Mon avis :

On ne peut rester insensible aux romans de cet auteur coréen, qui nous entraîne au cœur des problématiques actuelles de son pays.

L’auteur oppose la Corée moderne et riche aux banlieues isolées et défigurées.

La corruption dans le monde immobilier a contribué à accentuer les inégalités entre les différents quartiers.

Pour nous intéresser au sort de ces compatriotes les plus pauvres, il a imaginé un roman à deux voix avec un architecte célèbre et une jeune femme qui fait du théâtre par passion et vendeuse pour survivre. Deux personnages opposés reliés par leur envie de réussir de leur passion : l’architecte se bat pour sortir de sa condition, faire des études et devenir un grand architecte. Dans son enfance, il vivait dans un quartier très pauvre qui a continué à se dégrader sous la pression immobilière.

Un constat difficile pour cet homme qui a réussi et oublié d’où il venait. Est-ce trop tard ? Comment agir pour retrouver ses racines et s’accepter ?

On peut aussi se demander : quel avenir pour ce pays coupé en deux ?

Un roman qui nous invite à poser un autre regard sur ce pays.

Merci Babelio et les Éditions Philippe Picquier pour cette lecture.

 

Notation :