Auteur/autrice : <span>des Pages et des îles</span>

Chronique de : La Sirène d’Isé d’Hubert Haddad

La Sirène d’Isé

Résumé :

À la pointe sud de la baie d’Umwelt, loin du monde et hors du temps, le domaine des Descenderies a accueilli des générations de patientes. Né de la fragile Leeloo, Malgorne grandit sous la houlette de Sigrid, entre incompréhension et possession jalouse. Il trouve bientôt refuge dans le dédale de l’extravagant labyrinthe d’ifs, de cyprès, de pins et de mélèzes imaginé par le Dr Riwald. S’il n’entend ni le ressac ni les vagues qui se déchirent sur les brisants, Malgorne se nourrit des vents et scrute sans fin l’horizon.

L’auteur :

Hubert Haddad nous implique magnifiquement dans son engagement d’intellectuel et d’artiste, avec des titres comme Palestine (Prix Renaudot Poche, Prix des cinq continents de la Francophonie), les deux volumes foisonnants du Nouveau Magasin d’écriture, ou le très remarqué Peintre d’éventail (Prix Louis Guilloux, Grand Prix SGDL de littérature pour l’ensemble de l’œuvre).

Ma chronique :

Un plaisir de lecture qui se déguste comme une friandise douce et sucrée, cela se lit doucement, pourquoi pas à voix haute pour nos passages préférés.

Avec Hubert Haddad, partez dans le monde du merveilleux avec beaucoup de poésie, un peu de surnaturel et une dose de sensibilité.

Si l’écriture est unique et magnifique, les personnages aussi sont remarquables et exceptionnels comme Malgorne, le jeune sourd qui nous entraîne dans son monde végétal.

Les livres d’Hubert Haddad sont comme des bijoux précieux : impossible de ne pas tomber sous leur charme. Sans doute grâce à son style inimitable et à ses histoires si poétiques : au final, un plaisir infini de lecture.

Beau, magnifique : les adjectifs me manquent… je n’ai pas le talent d’Hubert Haddad pour décrire mes ressentis de lectrice.

À découvrir absolument aux éditions Zulma.

Notation :

Chronique de : Les lueurs du lendemain de Jennifer Cody Epstein

Les lueurs du lendemain

Résumé :

Berlin, 1933. Amies depuis leur plus tendre enfance, Ilse et Renate, deux adolescentes, sont confrontées aux bouleversements provoqués par la montée du nazisme. Séduite par l’esprit de corps et l’idéal prônés par les Jeunesses hitlériennes, Ilse incite Renate à s’enrôler, mais celle-ci, juive, est cruellement rejetée. Lorsque les lois de Nuremberg sont promulguées, les jeunes filles se retrouvent alors ennemies malgré elles… 

L’auteure :

Jennifer Cody Epstein est journaliste. Elle vit aujourd’hui à Brooklyn avec son mari et ses deux filles. « Les Lueurs du lendemain » est son premier roman traduit en français.

Ma chronique :

Coup de cœur pour ce livre : l’histoire de ces deux jeunes filles est très émouvante, c’est tendu et fort. Un grand livre.

J’ai vécu un grand moment littéraire en compagnie de ce livre. Le destin de ces femmes pendant la montée du nazisme est bouleversant : Ilse et Renate sont si proches au début des années trente, à la fois différentes et complices. Ilse est attirée par les mouvements de la jeunesse du nouveau régime. Renate se fera refouler car sa pureté aryenne est entachée par des ancêtres lui dit-on. Tout s’écroule.

L’histoire ne fait que démarrer et l’auteure nous entraîne dans les pas de Renate et de ses parents qui tentent de survivre malgré la déferlante anti-juive. Ilse côtoie de plus en plus près le nouveau pouvoir. Se rencontreront-elles de nouveau ? Quel est leur destin ? 

La voix d’Ava, la fille d’Ilse résonne régulièrement puisque nous la suivons également des décennies plus tard. 

Ces trois femmes, au fort tempérament, nous font vibrer tout au long du récit : la tension monte crescendo, le mystère plane sur la vie d’Ava plus tard. Qui est son père ? Quelles sont ses origines ?

Haletant et bouleversant, c’est le premier ouvrage que je lis retraçant les heures sombres des mouvements des jeunesses hitleriennes : l’endoctrinement sans concession de ces jeunes adolescents.

Le thème du pardon est là sous-jacent tout au long du livre.

Un livre à ne pas manquer.

Publié aux éditions Les Escales.

Notation :

Chronique de : Le berger d’Anne Boquel

Le berger

Résumé :

Lucie est conservatrice d’un petit musée de l’Oise. Rien ne va vraiment mal dans sa vie, rien ne va vraiment bien non plus. Le jour où une amie l’embarque dans un groupe de prière, son existence prend une couleur plus joyeuse. Elle se sent revivre. D’autant que le Berger et maître à penser de la communauté lui fait intégrer le cercle restreint des initiés…

L’auteure :

Anne Boquel vit et enseigne à Lyon. Elle a coécrit avec Étienne Kern plusieurs essais remarqués sur la littérature et les écrivains.

Ma chronique : 

Un livre particulièrement poignant et glaçant qui dépeint les dérives sectaires.

Une lecture qui frappe, j’étais complètement avec Lucie, partageant son quotidien de jeune femme happée par cette emprise. Pourquoi cela a-t-il vrillé ? Comment peut-on se laisser déborder ainsi et se soumettre à la volonté de quelques-uns ? 

Son parcours est pourtant banal : des parents éduqués, une enfance heureuse et un boulot intéressant. Oui mais elle vit seule et la solitude lui pèse. Elle n’est pas toujours à l’aise avec ses parents, ils n’ont pas la même vie et reçoivent beaucoup.

Sa solitude et fragilité psychologique vont la pousser doucement mais sûrement à fréquenter une confrérie qui parle du Christ et de rédemption. Elle est est très attirée par le « berger » celui qui dirige la secte. Très charismatique, il a une voix douce et un petit mot gentil pour chacun.

La jeune femme évoque la notion de « béquille » quand elle pense à ses nouveaux amis et sent une « unité » qui lui rend la vie plus attractive.

Son cheminement est décortiqué et émouvant pour nous lecteurs.

La plume est très fluide, l’histoire prenante : je l’ai lu vite en deux fois seulement, je n’arrivais pas à le poser.

Publié aux éditions du Seuil.

Notation :

Cent ans de Laurelfield de Rebecca Makkai

Cent ans de Laurelfield

Résumé :

1999 : Bienvenue à Laurelfield, vaste demeure du Midwest et partez à la rencontre de ses propriétaires ancestraux, les Devohr. Il y a Zee, une marxiste qui méprise la richesse de ses parents, tout en vivant dans leur maison avec son mari Doug ; sa mère Grace, qui prétend pouvoir tout savoir d’une personne en regardant ses dents ; et son beau-père Bruce, occupé à faire des réserves pour l’arrivée imminente de l’an 2000. 

L’auteure :

Rebecca Makkai vit actuellement à Chicago avec son mari et ses deux filles. Après Chapardeuse (Gallimard, 2012), Les Optimistes est son second roman traduit en français.

Ma chronique :

Un livre envoûtant à la construction originale, ce qui m’a le plus impressionnée : le plaisir de lecture grandit au fur et à mesure que l’on progresse.

Au départ, fin 99, les héros sont les descendants des administrateurs d’un lieu de vie pour artistes. Cette maison renferme de multiples secrets et une atmosphère rappelant parfois la colonie d’artistes. Le grenier semble être un endroit crucial pour ceux qui s’intéressent à l’histoire de cette maison comme le gendre de Grace.

Le décor est planté dès cette première partie mais les artistes ne seront présents réellement que bien plus tard. L’auteure au fil des pages remonte le temps pour arriver jusqu’en 1929, période où les artistes vivaient sur place.

Nous comprenons au fur et à mesure que nous remontons le temps pourquoi Grace cache certains secrets dans son grenier. Tout s’éclaire alors.

J’ai aimé ces personnages riches et complexes pour un roman plein de vie avec des artistes désinhibés.

Une histoire qui résonne en nous longtemps après avoir terminé la lecture.

Publié aux éditions Les Escales.

Notation :

Chronique de : La Pâqueline d’Isabelle Duquesnoy

La Pâqueline

Résumé :

Maudite année 1798 pour la Pâqueline ! D’abord le procès de son fils Victor, qui lui vaut une réputation ignominieuse. Et maintenant l’incendie de sa maison ! Réfugiée chez son rejeton, qui a fait fortune de son métier d’embaumeur et de trafics d’organes, exaspérée, elle accouche d’une idée diabolique : elle va lui jeter au visage les secrets dramatiques de son enfance, en couvrant les murs de ses écritures. Et ira jusqu’à le dépouiller de ses richesses…

L’auteure :

Après le succès de L’Embaumeur, prix Saint-Maur en poche et prix de la ville de Bayeux, Isabelle Duquesnoy nous livre le portrait d’une mère abominable, qu’on se surprendra étrangement à aimer, écrit dans une langue époustouflante, entre préciosité du XVIIIe siècle et démesure rabelaisienne. 

Ma chronique :

Truculent et  glauque, la suite de « l’embaumeur » peut plaire ou choquer.

Voilà une histoire digne de Rabelais ou d’Eugène Sue « Les Mystères de Paris », avec le décor des bas-fonds de Paris en cette fin du dix-huitième siècle.

Le sous-titre de l’histoire « les mémoires d’une mère monstrueuse » résume bien le roman. Pâqueline a des excuses se dit-on quand on découvre son histoire, horrible. Je vous préviens, il faut avoir le cœur bien accroché. Ce n’est pas une époque tendre.

Elle a beaucoup souffert la donzelle dès son plus jeune âge, tous ses malheurs narrés avec de multiples détails racontent la vie difficile des femmes pauvres à cette époque.

Le style fleuri et argotique contribue à restituer parfaitement l’atmosphère de cette fin de siècle, quelques années après la révolution française.

Un récit historique atypique qui plaira à tous ceux qui cherchent une peinture réaliste de cette période, l’histoire un peu rocambolesque cadre avec le décor sombre et le contexte hors norme.

À découvrir aux éditions de la Martinière.

Notation :