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Helen MacDonald : M pour Mabel

M pour Mabel
M pour Mabel

Résumé : Enfant, Helen rêvait d’être fauconnier. Elle nourrit des années durant son rêve par la lecture. Devenue adulte, elle va avoir l’occasion de le réaliser. De manière brutale et inattendue, son père, journaliste qui a marqué profondément sa vision du monde, s’effondre un matin dans la rue. Terrassée par le chagrin, passant par toutes les phases du deuil, le déni, la colère, la tristesse, Helen va entreprendre un long voyage physique et métaphysique. Elle va se procurer un rapace de huit semaines, le plus sauvage de son espèce, Mabel. Réputé impossible à apprivoiser.

 

L’auteur : Helen Macdonald est écrivain, illustratrice, historien, naturaliste. Elle est chargée de recherches au Département d’Histoire et de Philosophie des Sciences de l’Université de Cambridge.

 

Mon avis :

Mon premier “nature writing”, c’est-à-dire un récit avec une nature omniprésente agrémenté de considérations philosophiques.

Une découverte dont je ressors avec un avis en demi-teinte.

L’auteure décide de se procurer un autour et de le dresser : une échappatoire pour oublier la douleur de la perte de son père. Choisir un autour, sorte d’épervier, réputé le plus difficile à éduquer, c’est prendre des risques et se remettre en question. Son but : se réfugier dans le dressage de l’autour en se concentrant sur le moment présent, la nature, le soleil et son rapace. Ainsi, Helen va tout faire pour se retrouver après ce deuil et se reconstruire.

Le récit est entrecoupé de passages en hommage à l’auteur anglais T. H. White qui entreprit aussi de dresser un rapace.

Je n’ai pas été emballée par cette lecture : je me suis ennuyée en lisant les nombreuses descriptions souvent techniques sur le dressage des rapaces. L’ensemble est plat, le lecteur suit le parcours d’Helen sans le sentiment d’empathie auquel on devrait s’attendre.

Pour les côtés positifs : essentiellement une belle écriture qui garde le lecteur en contact.
A réserver aux amateurs de “nature writing” inconditionnels de rapaces.

Merci à Babelio et aux éditions Fleuve Éditions.

Notation :

Anna Hope : Le chagrin des vivants

Le chagrin des vivants
Le chagrin des vivants

Résumé : Durant les cinq premiers jours de novembre 1920, l’Angleterre attend l’arrivée du Soldat inconnu, rapatrié depuis la France. Alors que le pays est en deuil et que tant d’hommes ont disparu, cette cérémonie d’hommage est bien plus qu’un simple symbole, elle recueille la peine d’une nation entière. À Londres, trois femmes vont vivre ces journées à leur manière. Evelyn, dont le fiancé a été tué et qui travaille au bureau des pensions de l’armée ; Ada, qui ne cesse d’apercevoir son fils pourtant tombé au front ; et Hettie, qui accompagne tous les soirs d’anciens soldats sur la piste du Hammer-smith Palais pour six pence la danse.

 

L’auteur : Anna Hope est née à Manchester. Elle a ensuite étudié à Oxford et à Londres. Le chagrin des vivants est son premier roman.

 

Mon avis : Délicat et touchant, voici un très beau roman à découvrir.

Lumineux, tout en nuances subtiles, nous suivons trois femmes secouées par la première guerre mondiale. A Londres, la plus jeune gagne sa vie en monnayant ses danses. La deuxième, Evelyn, travaille dans un organisme qui accueille les soldats dans leurs réclamations autour de leurs pensions. Quant à Ada, plus âgée, femme au foyer, elle attend que son fils rentre. Celui-ci a été déclaré disparu mais aucune précision n’a été apportée aux parents ni sur les circonstances du décès ni sur l’endroit où il a été enterré. Ada refuse sa mort et le voit dehors ou dans sa maison, elle est très perturbée.

Nous sommes en 1920, chacune souffre de la perte ou des blessures d’un proche tout en assurant le quotidien. Les femmes ont dû remplacer les hommes dans leur travail pendant la guerre et au-delà lorsqu’ils ne sont pas rentrés. La détresse de ses femmes est palpable, le lecteur partage leur peine et doutes. Leur vie est devenue tellement compliquée dans ces années d’après guerre : les rares hommes qui restent sont éclopés et ressemblent à des fantômes.

Pour ces femmes, leur quotidien se résume à cette question : comment se reconstruire avec le poids de ce passé ?

Après avoir passé les premières pages qui m’ont paru embrouillées avec les nombreux aller-retour entre les personnages, le rythme s’installe ensuite et nous commençons à cerner les héroïnes. Le style devient plus fluide.

Une belle plume et beaucoup de dialogue dépeignent des personnages attachants et émouvants. Une atmosphère et ambiance parfaitement restituées, telle la photo de la belle couverture, l’auteure a réussi à nous immerger dans ces années 20.

Un beau premier roman que je recommande.

 

Sélectionné par le Grand Prix des lectrices Elle 2017.

Notation :

Jonathan Galassi : Muse

Muse
Muse

Résumé : Paul Dukach est l’héritier présomptif de Purcell & Stern, l’une des dernières maisons d’édition américaines indépendantes, dont les bureaux miteux, au cœur de New York, dissimulent un catalogue fabuleux. Il apprend les ficelles du métier aux côtés du flamboyant président de la maison, Homer Stern : comment s’attirer les bonnes grâces d’un agent littéraire au cours d’un déjeuner en ville, survivre au milieu des requins de l’édition à la foire de Francfort et, surtout, ménager les égos fragiles des auteurs aussi éblouissants que versatiles qu’il chérit. Mais un écrivain fait l’objet de l’adoration sans bornes de Paul : la poète Ida Perkins, dont les vers et la vie ont façonné le paysage littéraire contemporain de l’Amérique, et dont l’éditeur – qui se trouve être son cousin et ancien amant – est le plus grand rival d’Homer.

 

L’auteur : Président des prestigieuses éditions Farrar, Straus & Giroux, Jonathan Galassi est un acteur essentiel du monde de l’édition aux États-Unis. Auteur de trois recueils de poésie, traducteur des poètes Eugenio Montale et Giacomo Leopardi, éditeur de poésie pour The Paris Review, il écrit aussi pour The New York Review of Books, entre autres publications.

 

Mon avis :

Un ovni littéraire pour tous ceux qui rêvent de connaître le monde de l’édition. Les amoureux de littérature pourront s’intéresser à ce texte, pour les autres cela reste à confirmer.
C’est un roman écrit pour des aficionados, la langue plutôt riche et au style parfois ampoulé ne me paraît pas à la portée de tous. Aimer la poésie peut également aider à la lecture.

Après ces précisions, sachez que nous suivons Paul, un éditeur passionné de poésie. Il vénère Ida, la poétesse; l’auteur a eu l’idée de glisser des poèmes dans le texte pour nous immerger dans l’ambiance.
Paul soutenu par Homer, le président de la maison d’édition, fera tout pour publier son idole. Nous sommes plongés dans les arcanes du monde éditorial new-yorkais : nous y découvrons ce monde de l’édition et les rapports entre écrivains et agents littéraires.

Un premier roman qui rend hommage à la littérature et nous offre une peinture d’un milieu que nous lecteurs côtoyons sans le connaître.
À découvrir en cette rentrée littéraire.

Merci à l’agence Anne et Arnaud et aux éditions Fayard.

 

Notation :

Franck Thilliez : Rêver

Rêver
Rêver

Résumé : Si ce n’étaient ses cicatrices et les photos étranges qui tapissent les murs de son bureau, on pourrait dire d’Abigaël qu’elle est une femme comme les autres. Si ce n’étaient ces moments où elle chute au pays des rêves, on pourrait jurer qu’Abigaël dit vrai. Abigaël a beau être cette psychologue qu’on s’arrache sur les affaires criminelles difficiles, sa maladie survient toujours comme une invitée non désirée. Une narcolepsie sévère qui la coupe du monde plusieurs fois par jour et l’emmène dans une dimension où le rêve empiète sur la réalité. Pour les distinguer l’un de l’autre, elle n’a pas trouvé mieux que la douleur.

 

L’auteur : Franck Thilliez est l’auteur de plus d’une dizaine de romans, parmi lesquels Atomka, Le Syndrome E et, plus récemment, Pandemia. Lauréat du prix Étoiles du Parisien-Aujourd’hui en France pour le meilleur polar 2014 avec Angor, il confirme sa place de pilier du thriller français et continue d’alterner one-shots et enquêtes menées par son couple phare Lucie Henebelle/Franck Sharko.

 

Mon avis :

Mon premier roman de Franck Thilliez lu grâce à la sélection du jury des lectrices Elle.

Un thriller redoutable que j’avais du mal à lâcher : 600 pages avalées en trois lectures et sur un week-end.

Dès le départ, l’auteur installe un climat tendu et nous accroche immédiatement avec son intrigue. Abigail est une jeune psychologue qui aide la police dans les enquêtes difficiles comme celle-ci qui concerne des disparitions d’enfants.

Spécialiste en psychiatrie criminelle, elle décortique les faits en s’intéressant aux plus petits indices en notant tout. Ce qui complique son travail, c’est sa maladie : la narcolepsie qui la fait sombrer brutalement dans un sommeil peuplé de rêves et de cauchemar. Une tragédie personnelle se superpose à la difficile enquête qu’elle mène pour retrouver les enfants disparus.

Abigail va lutter contre sa maladie qui la dévore au point de lui voler sa mémoire. Nous lecteurs, sommes dans la tête de la psychologue et c’est compliqué et bien enchevêtré.

Ce thriller m’a scotchée et gardée en haleine tout du long, très efficace.
La construction originale du roman m’a interpellée : les chapitres ne sont pas chronologiques, l’histoire se déroule sur six mois, une indication de temps est donnée en début de chapitre. Non seulement cela ne nuit pas à l’histoire mais cela renforce la cadence haletante. Le lecteur tourne les pages encore plus vite pour reconstruire l’histoire.

L’introduction est importante : ne pas la sauter. Elle donne le ton en nous indiquant que le voyage sera temporel et que l’on sera plongé dans les replis les plus sombres de l’esprit humain.

C’est exactement ce que l’on pense en refermant ce livre : un puzzle complexe prenant, intriguant, émouvant et qui se découvre complètement en fin de lecture. Une prouesse, bravo à l’auteur.

Sélectionné par le Grand Prix des lectrices Elle 2017

Notation :

Emma Cline : The girls

The girls
The girls

Résumé : Le Nord de la Californie, à l’époque tourmentée de la fin des années 1960. Evie Boyd a quatorze ans, elle vit seule avec sa mère, que son père vient de quitter. Fille unique et mal dans sa peau, elle n’a que Connie, son amie d’enfance. Mais les deux amies se disputent dès le début de l’été qui précède le départ en pension d’Evie. Un après-midi, elle aperçoit dans le parc où elle est venue traîner, un groupe de filles dont la liberté, les tenues débraillées et l’atmosphère d’abandon qui les entoure la fascinent. Très vite, Evie tombe sous la coupe de Suzanne, l’aînée de cette bande, et se laisse entraîner dans le cercle d’une secte et de son leader charismatique, Russell.

L’auteur : Emma Cline est une jeune californienne de 27 ans qui signe ici son premier roman.

Mon avis :

Un roman merveilleux et captivant tout du long.

“The girls” fait couler beaucoup d’encre bien qu’il ne soit pas encore paru, après lecture je comprends pourquoi. Ce récit vaut le détour à la fois pour l’histoire, l’ambiance et la qualité de l’écriture.

L’histoire : une jeune fille, Evie, se sent à l’étroit dans le domicile parental. Elle s’ennuie beaucoup depuis qu’elle vit seule avec sa mère et encore plus après la dispute avec sa meilleure amie. Désœuvrée, la rencontre avec une bande de filles qui sont en train de voler de la nourriture, va la faire basculer. Insidieusement, l’amitié puis l’adoration qu’elle porte à Suzanne vont l’entraîner à participer à des mauvais coups.

Evie a l’impression d’exister lorsqu’elle est en compagnie des jeunes filles et de Russell, le gourou. Si elle se plie à ses exigences, c’est pour plaire à Suzanne et appartenir à un clan.

Pour servir ce récit, une écriture fine, ciselée, imagée et superbe : j’ai beaucoup aimé.

Un beau texte sur les tourments de l’adolescence et les dérives sectaires.

Universel et faisant écho à d’autres situations se déroulant à notre époque, nous suivons cette descente aux enfers en frémissant pour ces filles, les héroïnes. La figure masculine, gourou compris, est reléguée au second plan, comme la fameuse affaire qui a inspiré ce récit.

La révélation de cette rentrée littéraire : un gros coup de cœur pour ce roman terriblement prenant sur le désenchantement de la jeunesse.

Foncez sans hésitation.

Merci à l’agence Anne et Arnaud et aux éditions de la Table Ronde.

Notation :