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Saïdeh Pakravan : La trêve

La trêve
La trêve

Résumé : Plus aucun crime, plus de violence, plus de suicides, plus de crises cardiaques, de viols, de meurtres, d’accidents de voiture, d’agressions. Plus d’appels dans les commissariats, et les urgences des hôpitaux restent vides. La foule enthousiaste danse dans les rues, s’embrasse et scande : « Trêve éternelle ! » Pourtant, deux individus sont hantés par une question : la trêve va-t-elle durer, et si oui… jusqu’à quand ?

 

L’auteur : Saïdeh Pakravan, écrivaine franco-américaine de fiction et poète, est née en Iran. Ayant grandi dans un milieu francophone, elle s’installe à Paris, participant, après la révolution iranienne de 1979, à un mouvement de libération de l’Iran. Publiée dans de nombreuses revues littéraires et anthologies, lauréate de prix littéraires dont le prix Fitzgerald, Saïdeh Pakravan est également essayiste et critique de film.

 

Mon avis :

La trêve est un un roman kaléidoscope dans lequel une multitude de personnages vivent une journée extraordinaire.

La vie est comme suspendue : plus de violence, ni accident, ni mort ni même naissance. Tous les personnages sont d’abord confrontés à une situation stressante qui ne dégénère pas puisque la trêve est là. Les histoires défilent, différentes à chaque chapitre, c’est même déstabilisant au départ puis on s’habitue et surtout on s’attache au récit. Que va-t-il se passer pour toute cette population ? Plus jamais de dérive ?

Les situations sont variées, avec un point commun : une violence annihilée par l’effet de la trêve. Chacun réfléchit alors et prend son destin en main : une prise de conscience s’opère, c’est le moment de faire le bilan de sa vie.

Certains personnages reviennent plusieurs fois comme Simon le policier et Mandy la journaliste. Kim et Jennifer, deux jeunes amants poursuivis par un mari jaloux apparaissent dans plusieurs chapitres également.

Cette galerie de portraits d’hommes et femmes rappelle “Short cuts” de Robert Altman, tous ces personnages qui se croisent ou pas, tous reliés par les conséquences de ce nouveau phénomène : la trêve. L’histoire n’est pas vraiment importante au final, on retient plutôt leurs hésitations, passions, errances et nous lecteurs, sommes suspendus tout du long à cette lecture.

Ce n’est pas un roman d’anticipation, plutôt une fiction remplie d’humanité, à découvrir.

Parution le 25 août aux éditions Belfond.

Merci aux éditions Belfond.

Notation :

Andres Trapiello : D’un vaisseau fantôme

D'un vaisseau fantôme
D’un vaisseau fantôme

Résumé : Début des années 70 : Martin part étudier à V., petite ville d’Espagne aux couleurs délavées. Rempli du désir de rompre avec le conformisme familial et des idéaux qui forgent la jeunesse, il rejoint vite les rangs d’un des nombreux groupuscules communistes florissant dans les couloirs de l’Université, tandis que s’essouffle le franquisme.

 

L’auteur : Journaliste et figure littéraire de premier plan en Espagne, Andrés Trapiello est l’auteur d’une importante œuvre poétique, d’un journal en quinze volumes, et de six romans, dont Los amigos del crimen perfecto, prix Nadal en 2003. Trois de ses romans ont été publiés en français : D’un vaisseau fantôme (La Table Ronde, 1994), Les Cahiers de Justo García (Buchet-Chastel, 2004, 10/18 en 2006) et À la mort de Don Quichotte(Buchet-Chastel, 2005), prix de la Fondation José Manuel Lara Hernandez. Il a aussi signé une biographie de Cervantès, publiée chez Buchet-Chastel en 2005.

 

Mon avis :

Voici une réédition d’une œuvre de 1994, qui vient de paraître dans la collection Petite Vermillon. Un auteur espagnol que je découvre grâce à cette lecture.

Nous suivons le parcours de plusieurs étudiants, dans une ville espagnole, au temps où le franquisme sévissait encore.

Notre héros, a voulu échapper à l’étroitesse d’esprit de ses parents et à leur petite vie. A peine arrivé, auditeur en première année d’université, il se lie avec Rei, un jeune qui va lui présenter ses amis qui font partie des jeunesses communistes. Il devient “marxiste-léniniste tendance maoïste” dès le premier trimestre universitaire. Il rencontre des femmes aussi comme Céleste et Dolly, qui lui feront découvrir d’autres aspects de la vie. La deuxième année d’université se profile, Martin est toujours proche des “camarades” comme ils se nomment. Le franquisme va les rattraper.

C’est un beau roman d’apprentissage, sombre et poétique.

Violent aussi par moment, c’est une jeunesse malmenée par une société répressive et autoritaire : comment se construire dans ce contexte ?
On a envie d’étudier l’histoire espagnole pour comprendre cette période franquiste qui s’étale de 1936 à 1975.

En prime, une écriture captivante : à la fois fluide et savante.
En résumé : un roman attachant et poétique que je vous recommande.

Merci Alice et Anne-Lucie des éditions de la Table Ronde pour cette belle lecture.

 

Notation :

Kate O’Riordan : Un autre amour

Un autre amour
Un autre amour

Résumé : Connie et Matt Wilson sont parvenus à réaliser leur rêve : ils vivent avec leurs trois enfants dans une charmante maison londonienne. Alors qu’ils profitent d’un week-end pour passer un séjour romantique à Rome, tout bascule : Matt annonce à Connie qu’il ne rentrera pas avec elle. Elle retourne à Londres, retrouvant ses trois garçons, seule.

 

L’auteur : Kate O’Riordan est irlandaise, elle vit actuellement à Londres. Romancière, elle a notamment publié Intimes convictions, Une mystérieuse fiancée, Le garçon dans la lune et Pierres de mémoire, tous parus aux Éditions Joëlle Losfeld, elle écrit également pour le théâtre et le cinéma.

 

Mon avis :

Une lecture à ne pas manquer, je vais tenter de vous en convaincre mais je crains de ne pas avoir les mots adéquats : ma chronique risque d’être bien fade face à ce livre…

Je me lance malgré tout pour vous donner envie.

L’histoire : un couple, la quarantaine, part visiter Rome quelques jours. Au départ, on découvre Connie qui rentre, seule, sur Londres. Son mari a décidé de rester sur place. Pourquoi cette décision ? Connie cache à ses proches que son mari a préféré ne pas rentrer avec elle. Ses enfants ne comprennent pas, Mary, sa meilleure amie non plus. Comment a-t-elle pu accepter cette situation ? Puis nous découvrons le troisième personnage du trio amoureux : Greta.

Je ne vous en dirai pas plus, pour ne pas dévoiler l’intrigue car même si l’histoire peut paraître classique, elle ne l’est pas du tout. Les événements qui s’enchaînent nous font découvrir le vrai visage de chacun et comprendre le geste de Matt, le mari de Connie. Des liens profonds unissent les protagonistes et apparaissent progressivement.

Non seulement on peut saluer la richesse psychologique de la trame mais aussi le rythme car nous, lecteurs, sommes accrochés à l’histoire. Les hésitations et peurs de nos héros deviennent les nôtres. Tout est subtil, c’est du “cousu main”.

Un livre qui questionne aussi sur le couple, les choix et renoncements , l’amitié et l’amour maternel.
C’est une ode à l’amour : un livre aux entrées multiples, riche et profond, avec une écriture particulièrement efficace.

N’hésitez pas, foncez.

Merci Joëlle Losfeld pour cette belle découverte.

Ne pas oublier son dernier livre, excellent : “La fin d’une imposture

Notation :

Antoine Rault : La danse des vivants

La danse des vivants
La danse des vivants

Résumé : Eté 1918. Dans un hôpital militaire, un jeune homme se réveille amnésique. Il a tout oublié de son passé, jusqu’à son nom, mais parle aussi bien le français que l’allemand. Les services secrets français voient en lui l’espion idéal. Ils lui donnent l’identité d’un mort allemand…

 

L’auteur : Antoine Rault est né en 1965 à Paris. Depuis le succès de sa pièce Le Caïman en 2006, il est un dramaturge de renommée internationale, nominé cinq fois aux Molières et récompensé par le Grand Prix de l’Académie française. Il est notamment l’auteur du Diable rouge et, chez Albin Michel, du Démon d’Hannah (2009), de L’Intrus (2011), du Système (2015) et d’Un nouveau départ (2016). Il a également publié deux romans chez Albin Michel : Je veux que tu m’aimes (2010) et La vie dont tu rêvais(2014).

 

Mon avis :

Une grande fresque historique, riche et bien documentée.

Nous partageons le quotidien de Charles, jeune homme retrouvé amnésique en juillet 1918. Il a tout oublié, les autorités décident de le soigner tout en vérifiant qu’il n’est pas un simulateur. On découvre alors que les médecins ont mis au point un protocole avec des électrochocs pour tester la résistance des patients et faire réagir ceux qui mentent pour ne pas retourner au front.

Notre pauvre héros a vraiment tout oublié et souffre autant moralement que physiquement. Sa culture et son intelligence vont le sauver. Sans déflorer l’histoire, sachez qu’il devient espion pour la France et part pour Berlin avec l’identité d’un lieutenant allemand. Charles est bilingue français allemand, décidé à servir son pays. Cette mission lui permet d’exister et peut-être retrouvera-t-il sa mémoire ?

La fiction et l’histoire s’entrecroisent. Nous croisons Clemenceau et les autres protagonistes du traité de Versailles, j’ai suivi avec intérêt le destin du jeune Charles tout en m’intéressant au contexte historique bien retracé. Quelques petites longueurs lors des descriptions liées aux tractations autour du traité de Versailles.

Un roman historique et d’espionnage qui tient son lecteur globalement en haleine.

Les personnages sont attachants voire touchants pour certains, une belle lecture donc.
Une belle entrée en matière pour cette rentrée littéraire de 2016.

Parution le 18 août chez Albin Michel.

Merci Babelio et les éditions Albin Michel.

Notation :

Hervé Commère : Ce qu’il nous faut c’est un mort

Ce qu’il nous faut c’est un mort
Ce qu’il nous faut c’est un mort

Résumé : Trois garçons pleins d’avenir roulent à flanc de falaise. C’est la nuit du 12 juillet 1998, celle d’I will survive. Ce que la chanson ne dit pas, c’est à quel prix. Les Ateliers Cybelle emploient la quasi-totalité des femmes de Vrainville, Normandie. Ils sont le poumon économique de la région depuis presque cent ans, l’excellence en matière de sous-vêtements féminins, une légende – et surtout, une famille.

 

L’auteur : Hervé Commère est né à Rouen et vit à Paris. Après des études de lettres, il a commencé une double vie de serveur le jour et écrivain la nuit. Le premier roman qu’il a écrit est « fabuleux » selon les dires de sa maman. Tout comme le second. En 2006, il s’installe à Rennes, et a l’idée d’un nouveau roman, J’attraperai ta mort, qui paraîtra en 2009 avant Les ronds dans l’eau, son second roman paru chez Fleuve Éditions en 2011, lauréat du Prix Marseillais du Polar 2011.

 

Mon avis :

J’ai apprécié ce roman “noir” à classer aussi dans la catégorie roman social.

Au début du livre, les personnages évoluent le 12 juillet 98, la fameuse soirée du “3-0” avec la victoire française au football. Les protagonistes de ce récit verront tous basculer leur vie lors de cette célèbre nuit.

L’auteur nous entraîne ensuite au cœur de la vie et de l’histoire d’un village normand marqué par les ateliers de confection de lingerie. Nous remontons le temps pour découvrir l’histoire de la création d’ateliers de confection démarrés dans une salle de café par quelques passionnés et remarqués par l’élite de la couture parisienne comme des proches de Coco Chanel. La première génération de patron a décidé de tout faire pour s’attacher les couturières aux doigts de fée qui réalisent des ouvrages remarquables. Elles sont bien payées, considérées et disposent d’avantages comme des maisons gratuites. Les ateliers grossissent et emploient plus d’une centaine d’ouvrières, le village vit grâce à cette activité prospère. Les patrons se suivent et ne se ressemblent pas.

Plus tard, le romancier nous montre la petitesse des plus riches face à la solidarité et la détermination des plus pauvres, le racisme ordinaire et la soif de pouvoir et d’argent de certains : malheureusement des thèmes présents trop souvent dans nos actualités quotidiennes.

Nous lecteurs, on s’attache à ces personnages blessés, chahutés par la vie et au destin dramatique. C’est aussi un hommage à la résistance des ouvriers et aux combats sociaux comme ceux d’une célèbre marque de lingerie.

J’ai pensé aussi au film de Cédric Klaplisch “Ma part du gâteau”, pour la rébellion face à l’inhumanité des fonds d’investissement qui cherchent la rentabilité à tout prix.

Vous trouverez donc dans ce livre à la fois du suspense pour son côté roman noir mais aussi une réflexion sur le destin de chacun.
Bien écrit, avec un rythme soutenu tout au long du récit, une grande aventure sociale à découvrir.


Sélectionné par le Grand Prix des lectrices ELLE 2017

Notation :