Catégorie : <span>LITTERATURE FRANCAISE</span>

Boléro de Michèle Lesbre

Résumé :

 

Dans l’euphorie du début des années soixante et sur fond de guerre d’Algérie finissante, une gamine, Emma, découvre le cinéma, l’amour fou, la réalité du monde et la mort. La musique entêtante du Boléro de Ravel rythme les deux étés à la campagne pendant lesquels Gary Cooper et Marilyn, plus vrais que la vraie vie, le disputent à Fred et Paul, ses Jules et Jim, sous la bienveillante protection de Gisèle, leur initiatrice et leur mentor. Bien des années plus tard, alors qu’Emma est solitaire et perpétuellement en quête d’un emploi, le passé resurgit, évoqué une fois encore par la musique du Boléro qui ravive les blessures de la guerre d’Algérie. Avec ce portrait tout en nuances d’une adolescente qui s’ouvre à la conscience du monde, et de la femme qu’elle est devenue, Michèle Lesbre, comme dans ses précédents romans, porte un regard subtil sur une vie en apparence ordinaire, une de ces trajectoires singulières qui ancrent l’écriture dans le réel.

Biographie :

Certains ouvrages de Michèle Lesbre ont été récompensés par la critique : Le Canapé rouge (finaliste du prix Goncourt, prix Pierre-Mac-Orlan, prix Millepages 2007), La Petite Trotteuse (prix des libraires Initiales Automne 2005, prix Printemps du roman 2006, prix de la ville de Saint-Louis 2006). L’auteur a été nommée chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres en janvier 2010.

J’affectionne particulièrement cette auteure et je suis toujours sous le charme de ces textes.

Pourquoi cet engouement ?

Pour son art de dépeindre le quotidien des gens ordinaires avec une plume extraordinaire.

L’héroïne, Emma, solitaire, sans homme et sans boulot se cherche et traverse la vie avec une impression d’être différente et détachée de tout. Ses souvenirs la ramènent à ce dernier été passé chez Gisèle alors que ses parents sont partis en vacances au bout du monde. Chez Gisèle, elle vit librement avec ses deux copains, écoute beaucoup le boléro de Ravel et profite des joies de la campagne. Sa vie est rythmée aussi par le cinéma, passion de Gisèle. Petit à petit, le lecteur découvre que la vie d’Emma a été profondément affectée par ce dernier été avec Gisèle. Je n’en dirai pas plus, je vous laisse le plaisir de découvrir cette histoire.

Ce roman est délicat et profond.

L’écriture est poétique, fluide et sensible. L’originalité de ses textes réside aussi dans leur construction, parsemés de références littéraires et de citations . Pour Boléro, les citations sont des dialogues de films, puisque Gisèle est passionnée de cinéma. Des dialogues de Marilyn, Gary Cooper ou Gary Grant selon les circonstances.

Ces textes sont toujours trop courts, je ne les oublie pas et je savoure d’avance le moment où j’ouvrirai un autre de ses romans.

Je vous invite à en faire autant.

Voir aussi ma chronique de “Écoute la pluie”.

 

Notation :

Pour trois couronnes de François Garde

Résumé :
Dans le bureau de feu Thomas Colbert, un magnat du commerce maritime, Philippe Zafar, le jeune préposé au classement des archives, découvre un bref texte manuscrit, fort compromettant pour celui qui s’en avérerait l’auteur.

On retrouve dans ce roman d’aventures, déployé sur un siècle et trois continents – de l’Amérique du Nord aux tropiques –, l’écriture vive et talentueuse de François Garde dont le précédent livre, Ce qu’il advint du sauvage blanc, a été récompensé par huit prix littéraires, parmi lesquels le prix Goncourt du premier roman.

Mon avis :

J’ai découvert François Garde grâce à Babelio et les éditions Folio pour lesquels j’ai chroniqué Ce qu’il advint du sauvage blanc. Ce texte m’a emballée.

Dans ce second roman, j’ai retrouvé l’aventure, l’exotisme, la quête d’identité avec un nouvel ingrédient : une enquête.

Le protagoniste, Philippe Zafar est “curateur aux documents privés”, métier qui consiste à trier les papiers d’un mort pour simplifier les tâches des héritiers. Une lettre retrouvée lors d’un classement le conduit à rechercher le fils du disparu.

Son enquête le mène dans plusieurs pays et plus particulièrement sur une île tropicale,ancienne colonie française, où le disparu est passé. Son enquête remue aussi ses propres souvenirs d’enfance. Libanais d’origine, élevé aux États-Unis, la disparition de son père est entourée de mystère. Les recherches sur la jeunesse de Thomas Colbert lui donnera-t-il des clefs pour comprendre ses origines ? A découvrir lors de votre lecture …

Comment classer ce livre ? Un mélange de genre : à la fois enquête, aventure, réflexion sur la filiation.

Les points forts : l’ambiance, l’écriture classique et irréprochable.

Tout cela donne un récit impeccable mais qui s’essouffle au milieu du roman : les digressions de l’auteur sur les recherches numismatiques ou les descriptions d’évènements historiques sur l’ile apportent peu à l’histoire et génèrent une part d’ennui pour le lecteur.

Intéressant mais pas palpitant, après la découverte de son premier roman un peu de déception donc.

A vous de décider maintenant.

 

Notation :

L’invention de nos vies de Karine Tuil

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Quatrième de couverture :
Sam Tahar semble tout avoir : la puissance et la gloire au barreau de New York, la fortune et la célébrité médiatique, un « beau mariage »…
Mais sa réussite repose sur une imposture. Pour se fabriquer une autre identité en Amérique, il a emprunté les origines juives de son meilleur ami Samuel, écrivain raté qui sombre lentement dans une banlieue française sous tension. Vingt ans plus tôt, la sublime Nina était restée par pitié aux côtés du plus faible. Mais si c’était à refaire ?
À mi-vie, ces trois comètes se rencontrent à nouveau, et c’est la déflagration…
«Avec le mensonge on peut aller très loin, mais on ne peut jamais en revenir» dit un proverbe qu’illustre ce roman d’une puissance et d’une habileté hors du commun, où la petite histoire d’un triangle amoureux percute avec violence la grande Histoire de notre début de siècle.

Biographie :
Karine Tuil est l’auteur de neuf romans parmi lesquels Tout sur mon frère (2003), Quand j’étais drôle {2005), Douce France (2007), La Domination (2008) et Six mois, six jours (2010), tous publiés chez Grasset.

Mon avis :
Un roman fort et dur sur les conséquences du mensonge. Un vrai suspense et une fine analyse des comportements de chacun des trois personnages principaux emportés dans un tourbillon incontrôlable.
L’intrigue est très bien ficelée et tient en haleine jusqu’au bout.
Trois personnages principaux : Samir, Samuel et Nina. Les deux garçons étudiants sont amoureux de Nina. Samir est ambitieux, rejeté par Nina, il va se réfugier dans ses études et veut réussir à tout prix. Pour oublier aussi son chagrin. Mais voilà, avec un prénom comme Samir, son CV n’accroche pas. Il se décide alors à enlever deux lettres, de devenir Sam et de ressembler à Samuel son ancien ami. Le jeune musulman devient juif aux yeux du monde, à partir de là, son destin bascule.
Sam est embauché dans un grand cabinet d’avocats et réussit très bien à New York.

Pourtant en France, sa mère, son demi-frère et ses deux anciens amis poursuivent une vie médiocre.
Comment Sam va-t-il gérer l’arrivée d’évènements qui vont bouleverser sa vie américaine ? Est-il complètement heureux puisqu’il ment à tous même à sa mère ?
Rassurez-vous, je ne vous raconterai pas le reste de l’histoire et je vous laisse la découvrir …

Pourquoi le lire : pour l’audace de l’histoire, pour la tension permanente et la vision de notre société.
Petits bémols : une écriture agréable mais parfois hachée, avec des “/” entre plusieurs mots pour donner un rythme, assez déroutant pour moi. Certaines situations sont assez caricaturales.

À lire pour les passionnés d’histoires fortes avec du rythme et du fond.

Dédicace : merci à la Médiathèque de Troyes pour ces choix toujours judicieux.

Notation :

Deux coups de coeur : Villa Amalia et Rêves oubliés

Coups de coeur pour ces deux romans : Villa Amalia et Rêves oubliés

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Villa Amalia de Pascal Quignard 

Biographie : Romancier, poète et essayiste, Pascal Quignard est né en 1948. Après des études de philosophie, il entre aux Éditions Gallimard où il occupe les fonctions successives de lecteur, membre du comité de lecture et secrétaire général pour le développement éditorial. Il enseigne ensuite à l’Université de Vincennes et à l’École Pratique des Hautes Études en Sciences Sociales.

Il a fondé le festival d’opéra et de théâtre baroque de Versailles, qu’il dirige de 1990 à 1994. Par la suite, il démissionne de toutes ses fonctions pour se consacrer à son travail d’écrivain.

A obtenu le grand prix de l’Académie française en 2000 pour Terrasse à Rome

Quatrième de couverture

«Loin devant les villas sur la digue, elle se tenait accroupie, les genoux au menton, en plein vent, sur le sable humide de la marée. Elle pouvait passer des heures devant les vagues, dans le vacarme, engloutie dans leur rythme comme dans l’étendue grise, de plus en plus bruyante et immense, de la mer.»

Mon avis : 

Prenant, fort, émouvant et quelle belle écriture, difficile d’oublier ce livre, une fois refermė.

Aussi beau que le film, voici un livre sur le thème de ‘tout quitter pour renaître’.

Difficile de raconter cette histoire, avant tout prétexte à décrire les sentiments d’une femme délaissée par son mari, qui décide de tout quitter pour vivre autrement.

L’histoire démarre par la vision d’une femme, seule dans la nuit, qui épie son mari retrouvé dans les bras d’une autre. Au même moment, un homme, autrefois son camarade d’école la retrouve et une amitié profonde renait entre ces deux êtes désemparés.

Pour elle, la musique est un garde-fou, composer la sauve; elle découvre aussi la beauté d’une nature superbe au large de Naples grâce à l’isolement d’une maison Villa Amalia nichée dans les hauteurs d’une île au large de Naples. Dans ce lieu isolé, notre héroïne fera des rencontres qui vont la changer progressivement avec toujours la musique pour la soutenir.

Un beau texte, une écriture ciselée, des sentiments palpables qui nous émeuvent.

A lire absolument. 

 

Rêves oubliés d’Eleonor de Recondo

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Biographie de l’auteur

Née en 1976, Léonor de Récondo est violoniste et écrivain. Elle se produit avec de nombreuses formations, comme Les Talents Lyriques ou L’Yriade et enregistre des CD et DVD. Rêves oubliés est son deuxième roman. Elle vit aujourd’hui à Paris

 

Résumé 

“Etre ensemble, c’est tout ce qui compte” : voilà la devise d’Aïta, de sa femme Ama et de leur famille de républicains basques. En 1936, le franquisme les contraint à l’exil : d’Irun aux Landes françaises en passant par Hendaye. Dans son journal, Ama raconte les rires, l’amour, mais aussi la souffrance et la peur causées par les activités clandestines des oncles de son mari, la présence des Allemands en cette année 1939, la fuite. Car il faut toujours partir. Loin de la guerre et des souvenirs, pour survivre, et vivre dans le présent.

Un coup de cœur aussi ce roman.

Ecrit par une musicienne, faut-il voir un lien avec le texte précédent ? 

Le contexte : l’Espagne au temps du franquisme, puis la guerre éclate et à partir de là, le destin de toute une famille est alors bouleversé.

J ai découvert cet écrivain récemment avec « Pietra viva » et je suis tombée sous le charme.

Les ingrédients de ce roman : une histoire touchante, une écriture fluide, des personnages attachants, le contexte historique peu présent habituellement.

Un beau portrait de femme aussi comme Villa Amalia. 

Dans ce texte, ce qui touche le plus c’est l’amour qui unit les deux époux et leur permet de tenir. Un amour décrit avec délicatesse et émotion qui nous rend toute cette famille très proche : le mari mais aussi les enfants obligés de s’habituer à leur nouvelle vie au pays Basque Français.

Les ingrédients : une histoire émouvante ancrée dans un contexte historique méconnu, une écriture fluide et sensible.

Un bijou à découvrir.

Notation :

Une part de ciel de Claudie Gallay

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Quatrième de couverture
Aux premiers jours de décembre, Carole regagne sa vallée natale, dans le massif de la Vanoise, où son père, Curtil, lui a donné rendez-vous. Elle retrouve son frère et sa sœur, restés depuis toujours dans le village de leur enfance. Garde forestier, Philippe rêve de baliser un sentier de randonnée suivant le chemin emprunté par Hannibal à travers les Alpes. Gaby, la plus jeune, vit dans un bungalow où elle attend son homme, en taule pour quelques mois, et élève une fille qui n’est pas la sienne. Dans le Val-des-Seuls, il y a aussi le vieux Sam, pourvoyeur de souvenirs, le beau Jean, la Baronne et ses chiens, le bar à Francky avec sa jolie serveuse…
Dans le gîte qu’elle loue, à côté de la scierie, Carole se consacre à une traduction sur la vie de Christo, l’artiste qui voile les choses pour mieux les révéler. Les jours passent, qui pourraient lui permettre de renouer avec Philippe et Gaby un lien qui n’a rien d’évident : Gaby et Philippe se comprennent, se ressemblent ; Carole est celle qui est partie, celle qui se pose trop de questions. Entre eux, comme une ombre, cet incendie qui a naguère détruit leur maison d’enfance et définitivement abîmé les poumons de Gaby. Décembre s’écoule, le froid s’installe, la neige arrive… Curtil sera-t-il là pour Noël ?

 

Biographie

Née en 1961, Claudie Gallay vit dans le Vaucluse. Elle a publié aux éditions du Rouergue L’Office des vivants (2000), Mon amour, ma vie (2002), Les Années cerises (2004), Seule Venise (2004, prix Folies d’encre et prix du Salon d’Ambronay), Dans l’or du temps (2006) et Les Déferlantes (2008, Grand Prix des lectrices de Elle). Aux éditions Actes Sud : L’amour est une île (2010) et Une part de ciel (2013).

 

Mon avis :

Un roman profond sur les liens familiaux et les non-dits dans une famille éclatée. Une histoire de famille ou les retrouvailles de trois frères et sœurs. Carole la cadette, quitte Saint-Étienne pour rejoindre son frère ainé et sa petite sœur Gaby, tous trois attendent alors leur père qui a promis de les rejoindre. Curtil, ce père souvent absent même lorsqu’ils étaient petits, les a convoqués en leur adressant une boule de verre avec un paysage et la neige à l’intérieur. Ces boules annoncent son retour.

Arrivée dans son village natal, au cœur de la Vanoise, Carole la seule enfant partie à la ville, retrouve l’atmosphère d’antan et renoue progressivement avec son passé. Les jours défilent et l’attente se prolonge. Que faire ? Continuer d’attendre ou rentrer ? Cette attente est l’occasion de renouer avec les siens, de tenter de comprendre aussi ce qui s’est réellement passé lorsqu’un incendie a ravagé leur maison alors qu’ils étaient enfants. Tous trois étaient alors seuls avec leur mère et celle-ci parant au plus pressé a secouru d’abord les deux ainés laissant la petite Gaby dans les flammes, ce qui va la marquer à vie. Carole est torturée par la culpabilité, se posant beaucoup de questions sur cet accident et les choix de sa mère. Comment en parler à son frère et surtout à sa sœur ?

Le style et les descriptions de toute cette attente concourent à rendre une atmosphère cotonneuse amplifiée par les paysages enneigés. Les habitants ont aussi leurs secrets comme Sam le père de Jean ou la Veuve la tante de Carole; tous se côtoient et ne se parlent pas toujours parfois à cause du passé, ou parfois juste parce qu’ils vivent isolés.

Des personnages simples, humains souvent meurtris surtout très vrais, Claudie Gallay maîtrise l’art de les dépeindre et de nous les rendre attachants. Beaucoup de dialogue, de belles descriptions et le temps qui s’égrène doucement.  Ce que j’aime chez cette auteure, c’est la sensation de vivre complètement avec ses personnages, de les sentir proches et d’être en osmose avec eux.

Un bémol : des longueurs dans ces 450 pages, ou alors un choix de l’auteure qui ralentit la narration pour nous faire appréhender le calme de l’hiver dans une vallée isolée. Néanmoins cette absence de rythme génère un sentiment d’ennui par moment, comme pour notre héroïne, qui en attendant son père cherche des occupations.

 Au final, un sentiment un peu mitigé : une belle lecture parfois contrariée par les lenteurs du récit.  Je recommande cette lecture aux aficionados de Claudie Gallay, dont je fais partie, ainsi qu’aux autres lecteurs aimant les belles lectures éloignées des constructions de type thriller.

Avis aux amateurs !

Merci aux Matchs littéraires de Price Minister.

Le 8/11, le 1er Prix France Bleu/Terre de France a été attribué à Claudie Gallay pour son livre “Une part de ciel”

Notation :